Les cigognes (Ciconia ciconia) sont de retour ! Ces oiseaux fascinants captivent notre imagination depuis des siècles. Son long voyage migratoire, son comportement de nidification et son rôle légendaire dans la naissance des bébés en font un sujet d’intérêt pour les amateurs d’oiseaux et les curieux.
Chasse, alimentation, et prouesses de la cigogne blanche : un mode de vie fascinant !
La cigogne blanche est un grand oiseau élégant qui se distingue par son plumage blanc et noir, son long cou, son bec rouge-orangé, sorte de dague d’environ 19 cm et ses longues pattes également rouge-orangé. Cette silhouette élancée est caractéristique des oiseaux de la famille des Ciconiidés. Distinguer le mâle de la femelle (dimorphisme sexuel) n’est pas évident. Pour autant, le mâle est légèrement plus grand.

La cigogne blanche mesure en moyenne 1 mètre de hauteur et son envergure atteint souvent 1,60 mètre, parfois 2.15 m. Son poids varie de 3 à 3.5 kg. Comme tous les échassiers, elle est perchée sur de longues pattes sans plume, qui lui permettent de rester au sec dans leur zone de chasse de prédilection, les marécages, les prairies humides ou les grandes zones agricoles lorsqu’elles sont naturellement humides ou irriguées.
Les cigognes ne chantent pas, contrairement à la majorité des oiseaux. Seul un panel de claquements de bec et postures caractéristiques permettent aux individus de communiquer entre eux ou défendre leurs nids.

La cigogne, essentiellement carnivore
Comme la recherche de nourriture occupe la plupart de son temps, vous l’observerez certainement à l’affût. Sa posture de chasse est assez caractéristique : elle ne cherche pas à se camoufler, elle se positionne au milieu des champs, marais, bord des fossés où elle débusque insectes, mollusques, poissons, vers de terre, serpent et amphibiens. Si elle découvre le gite d’un rongeur, elle s’installe et attend patiemment sa sortie pour le transpercer de son bec.
Elle contribue également à la régulation de l’écrevisse de Louisiane (Procambarus clarkii), une espèce envahissante qui cause des dommages considérables à la végétation aquatique ainsi qu’aux populations de poissons et de batraciens.

La cigogne, une architecte au service de la famille
C’est le mâle qui choisit un emplacement (tronc, poteau électrique ou toit…) et commence à y installer une plateforme solide, réalisée à partir de rameaux de bois, de foin et d’herbe. La femelle conquise par l’emplacement et le partenaire termine la « décoration » en achevant la création de la cuvette qui accueillera les futurs oisillons. Cette étape se déroule entre février et mars. Les couples sont assez fidèles à leur territoire et reviennent d’une année sur l’autre, soit construire un nouveau nid, soit reprendre cet emplacement et y ajouter une nouvelle couche pour consolider la plateforme. C’est ainsi que certains nids peuvent atteindre au fur et à mesure des années, 1 tonne et demi, avec un diamètre de 2 mètres pour 1.5 m de haut.
Une fois le couple formé, voici le temps des audacieux et habiles accouplements qui s’effectuent sur le nid à partir de février. C’est entre mars et avril que 3 à 5 œufs blancs seront pondus. Ils seront couvés par les deux parents pendant 32/34 jours, chacun leur tour. C’est donc entre avril et mai que les cigogneaux briseront leurs coquilles.

La croissance est très rapide, car le couple les nourrit plusieurs fois par jour. A tour de rôle, ils déposent de petites proies régurgitées au centre du nid. Au bout de deux mois, les cigogneaux ressemblent à leurs parents, excepté la couleur des pattes et du bec qui resteront noirs encore quelques mois.
L’apprentissage de l’autonomie commence par le vol, puis la chasse. Ils trouveront dès la fin de mois d’aout de jeunes congénères pour migrer vers le sud. Ils y resteront jusqu’à leurs deux hivers révolus, car la nourriture y est abondante. Une fois adultes, ils reviendront chez nous/chez eux, et ainsi de suite, tous les ans. Les adultes, quant à eux rejoindront les pays chauds en septembre.

La cigogne, grande migratrice
Les cigognes restent en couple tout au long de la nidification et se rassemblent pour les migrations en groupe de plusieurs centaines d’individus (janv./fév. et aout/sept.). Elles parcourent parfois plus de 5 000 km à raison de 4 à 8 heures par jour à une vitesse moyenne de 50 km/h. Contrairement aux autres migrateurs, elles ne volent que le jour et seulement si les conditions météorologiques le permettent. En effet, elles ont besoin du soleil pour emprunter les courants d’air chaud et planer pour économiser leurs forces.
Arrivés sur le lieu d’hivernage, elles vont reconstituer leurs réserves pour nous revenir en pleine forme, excepté si elles subissent la pression de chasse en Afrique ou rencontre les lignes hautes tensions.

Sauvée de justesse par les passionnés et une tempête
En 1974, il y avait seulement 11 couples nicheurs de la Cigogne blanche en France, un en Ille-et-Vilaine, un dans la Manche et 9 en Alsace, ce qui mettait cette espèce au bord de l’extinction. Cependant, grâce aux efforts coordonnés par la LPO et les associations de sauvegarde de la biodiversité, notamment en mettant en place des plates-formes artificielles, le nombre de couples nicheurs de la Cigogne blanche en France est maintenant proche de 5 000.
Dès 1978, le Groupe Ornithologique Aunis Saintonge (GOAS) et la LPO ont commencé à installer de nombreuses plates-formes de nidification. Étant une espèce grégaire, cette opération a débuté dans le marais de Brouage, puis s’est étendue aux prairies humides de la Vallée de la Charente et du pays Rochefortais. Les efforts de conservation et l’arrivée d’oiseaux espagnols ont permis de recoloniser ce département et, plus généralement, toute la façade atlantique.
L’ouragan Martin de décembre 1999 et les vents violents qui ont endommagé de nombreux arbres en France a été une aubaine, elles ont commencé à construire à nouveau leurs nids dans les arbres, créant des colonies de reproduction. En 2011, il y avait 185 nids dans les arbres, contre 98 sur des plates-formes artificielles.

Un peu de folklore… un peu d’imagination…
La cigogne est généralement considérée comme un oiseau porte-bonheur, associé à l’attachement aux parents, car on raconte qu’elle prend soin de ses parents vieillissant. C’est d’ailleurs pour cette raison, que chez les anciens Grecs, la cigogne était considérée comme un symbole de fidélité envers les anciens parents, avec une loi obligeant les enfants à prendre soin de leurs parents. Elle était appelée « Pelargonia » en référence à « pelargos », signifiant cigogne.
Dans certaines régions, elle est également associée à la naissance des enfants, ce qui pourrait être lié à ses habitudes migratoires et à son retour au printemps. Cependant, elle est également associée à la conception, car son regard est supposé avoir le pouvoir de provoquer la grossesse, toujours en lien avec la symbolique de la cigogne liée à la fécondité et à la naissance.
En Chine, offrir une image de cigogne à un ami ou à un parent est un geste pour lui souhaiter une longue vie. Nous pouvons imaginer que cette réputation est liée à sa longévité estimée entre 20 à 30 ans.

Un retour en enfance, une touche de nostalgie avec La Fontaine
Le renard et la cigogne
Compère le Renard se mit un jour en frais,
Et retint à dîner commère la Cigogne.
Le régal fut petit et sans beaucoup d’apprêts :
Le galant pour toute besogne,
Avait un brouet clair ; il vivait chichement.
Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
La Cigogne au long bec n’en put attraper miette ;
Et le drôle eut lapé le tout en un moment.
Pour se venger de cette tromperie,
A quelque temps de là la Cigogne le prie.
« Volontiers, lui dit-il ; car avec mes amis
Je ne fais point cérémonie. »
A l’heure dite, il courut au logis
De la Cigogne son hôtesse ;
Loua très fort la politesse ;
Trouva le dîner cuit à point :
Bon appétit surtout ; renards n’en manquent point.
Il se réjouissait à l’odeur de la viande
Mise en menus morceaux, et qu’il croyait friande.
On servit, pour l’embarrasser,
En un vase à long col et d’étroite embouchure.
Le bec de la Cigogne y pouvait bien passer ;
Mais le museau du sire était d’autre mesure.
Il lui fallut à jeun retourner au logis,
Honteux comme un renard qu’une poule aurait pris,
Serrant la queue, et portant bas l’oreille.
Trompeurs, c’est pour vous que j’écris :
Attendez-vous à la pareille.
Jean de La Fontaine
Le quotidien d’un nid de cigogne : une histoire d’amour, de patience et de persévérance
A bientôt
🌿Virginie Varlet🌿
